Comment reprocher aux citoyens de ne pas respecter l’autorité de l’Etat quand les élus de la République affichent le mauvais exemple de leur côté ? L’événement Covid-19 que nous traversons en est l’illustration cacophonique.
Certains maires zélés décrètent couvre-feux, port du masque, achats strictement regroupés (aucun achat à l’unité, tel que le pain ou le journal), interdiction à plus de dix mètres du domicile, restriction des horaires pour certaines pratiques, impunité de la milice municipale, aggravant les mesures de confinement… comme demain seront fermées les écoles ou ouvertes les plages, les restaurants… par défi du jacobinisme. Les médias étaleront ainsi l’inaction du gouvernement et les "faits d'armes" des désobéissants.
Hier on bravait le pouvoir en décrochant des lieux publics le portrait du Président de la République, ou en appliquant la loi d’une façon personnelle (accueil gens du voyage ; sépulture à un autochtone ; permis en zone inondable ; rejet des intercommunalités ; tracé PLU…)
L'acte de désobéissance civile de l’élu se traduit donc par une posture politique. Pour refuser de remplir une obligation à laquelle il ne peut déroger, l’élu s’entoure de pétitions, tribunes publiques, "class action", rferendums, réseaux sociaux à la recherche d’un public à sa cause.
En général l’élu - censé symboliser la République - commet plutôt des actes personnels à l’insu de toute consultation qui pourrait le désavouer. Un excès de pouvoir admis par soumission ou désintérêt des administrés.
Ainsi, les écharpes tricolores sont souvent derrière les premières lignes: avortement 1971, Larzac 1981, LGV méditerranée 2001, OGM 2005, sans-papiers 2010, Port-Cros 2011, immigration 2015, voile et burkini 2016, épandage pesticides 2019...
Curieusement cette désobéissance est davantage sanctionnée par les tribunaux contre le particulier et le milieu associatif que contre l’élu, jamais démis, juste rappelé à l’ordre par sa tutelle.
Le 11 mai le pouvoir de police des maires va-t-il s'étendre à la police sanitaire ? Le Sénat vient de voter la relaxe pénale des élus locaux et fonctionnaires qui seront amenés à permettre la sortie du confinement*avec ce double langage : « Il n'est pas question de placer les élus au-dessus de la loi ».
Camouflet immédiatement relevé par le Président de la République :
« On ne doit pas donner le sentiment qu'il y aurait une amnistie pour les élus »
Mais, si les élus ne respectent plus l’autorité républicaine qui respectera les élus ?
*Pendant la durée de l'état d'urgence sanitaire, les articles L.3131-12 du code de la santé publique (prolongés jusqu'au 24 juillet 2020) confient au Premier ministre, au ministre chargé de la santé et au Préfet le pouvoir de prendre toute mesure de nature à faire face "à une catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population"
Aux termes de cette ordonnance, le préfet comme le maire peuvent "adopter" des "mesures plus contraignantes permettant d'assurer la sûreté, la sécurité et la salubrité publique".