Au début c’est l’ivresse du vainqueur sur l’autre, sans partage ni compromis. Puis, la soumission au pouvoir des citoyens transforme subtilement le lauréat en autocrate. Il voit la trahison partout, pratique le contrôle intégral, manipule l’opinion et la moindre contestation devient un obstacle qu’il lui faut briser pour asseoir sa prépotence. Ce syndrome de Munchausen corrode les élus rattrapés par le monde réel, la peur du bruit médiatique et l’ingratitude des administrés. Or, si le citoyen aime l’autorité qui s’applique aux autres, il déteste celle qui s’invite chez lui. L’image du politique rejoint celle des banquiers dans le public pour lequel le « job » reste réservé à l’homme vaniteux, plein de sa puissance et de son orgueil qui n’accepte de se voir dans le miroir révélateur de l’opinion dissimulée. Enfermé dans une aveugle suffisance, il se nourrit de l’étroitesse d’esprit et de la misère psychologique de sa cour qu’il a soigneusement disqualifiée. Il se suffit à lui-même et n’a besoin de spectateurs que pour applaudir son génie superficiel. Faites le tour des élus qui timbrent eux-mêmes leur courrier, voyagent à leurs frais, mettent en pratique leurs promesses... Après le suffrage, la vie ordinaire reprend vite sa place. Celle du troc, tribunaux administratifs, retours d’ascenseur, abus de pouvoir, décisions partisanes… La musique se fait alors moins douce aux oreilles des contribuables, avec cette éternelle devinette : « Qui t’a fait roi ? Qui t’a fait prince ? ». Réponse en 2014.