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Sur la côte, c’est le genre de terrain qui déchaîne les passions : 3 hectares à l’abandon, en centre-ville, à 200 mètres de la mer, face à la presqu’île de Giens. La dernière pépite de Carqueiranne... en passe de devenir la première source d’emmerdements judiciaires pour le maire et numéro 2 du conseil général du Var, l’UMP Marc Giraud.

Pendant quinze bonnes années, les mastodontes du BTP français, Bouygues en tête, ont défilé chez les Guiol, une vieille famille de paysans de la commune, pour leur racheter leurs anciens champs de fleurs. Mais ces terres au soleil, inconstructibles, valaient des nèfles. Les Guiol ne voulaient pas les brader et faisaient désespérément le siège de Giraud pour qu’il les rende constructibles... Jusqu’à ce qu’un beau jour de juin 2007 le miracle se produise.

Cet été-là, le plan d’occupation des sols est spécialement modifié par monsieur le maire. La valeur du mètre carré de terrain passe de quelques dizaines à plusieurs centaines d’euros. Mais attention ! Sur le papier, cette ouverture au bétonnage répond à une noble cause publique : « renforcer l’infrastructure hôtelière » et « satisfaire à la demande croissante de logements, notamment sociaux », dans cette station balnéaire où il en manque 700. Le conseil municipal de Carqueiranne et le préfet du Var applaudissent. Un acheteur se précipite et met la main sur le plus gros. Il s’agit d’un bâtisseur du cru, Michel Mattesi-Bosso, promoteur immobilier et expert-comptable (ça ne s’invente pas), bien en cour à la mairie.

Plan d’appropriation des sols

Cinq ans et demi plus tard, un hôtel, du genre modeste, est encore à l’état de plans. Et douze logements sociaux à peine sont en chantier. En revanche, sur la plus grande partie du site, les maçons ont déjà abattu un sacré boulot, chapeau ! Trois lotissements et un immeuble de 70 appartements, avec vue sur la mer, mais aussi plusieurs villas de standing, le tout quasi terminé.

carqueiranne.jpgQui sont les heureux propriétaires qui ont, les premiers, décroché leur permis de construire en 2010-2011 ? Nathalie Peinado, d’abord, qui n’est autre que la patronne de l’urbanisme de la ville, laquelle avait instruit la modification du plan d’occupation des sols en relation avec les Guiol. Elle leur a acheté 600 m², pour ériger sa villa avec piscine. Son voisin ? Un certain Philippe Voyenne. Lui, c’est le directeur de cabinet du maire, qui a monté sa baraque sur une parcelle de 400 m². Enfin, plus bas sur l’avenue qui mène à la mer et porte le doux nom de Beau-Rivage, bienvenue chez Frédéric Giraud, le fiston de l’édile.

Ç’a eu payé, mais ça paiera plus

Michel Mattesi-Bosso, qui a décroché le jackpot, n’est pas malheureux non plus. Il a acheté à très bon prix (150 euros le mètre carré...), aménagé puis revendu la quasi-totalité des terres, avec de formidables culbutes à la clé. Un habitué des bonnes affaires : dans un autre quartier, le Beau Vézé, il s’était pris quelques PV d’infraction, restés sans suite, en transformant des cabanes en immeubles et villas fort rentables.

Et les Guiol, dans tout cela ? En paysans avisés, ils ont conservé deux-trois lopins de terre sur lesquels, avec le produit de leurs ventes, ils ont construit pour les enfants. Bref, tous les amis sont contents. Ou plutôt l’étaient, jusqu’à la semaine dernière.

Les Guiol ont en effet ouvert le bal des auditions à la brigade financière de Toulon, dans le cadre d’une enquête préliminaire du parquet pour prise illégale d’intérêt et entente frauduleuse (« France 3 », 7/1). Aux poulets, qui n’ont pas fini de rigoler, les paysans ont raconté une drôle d’histoire. En 1999, après la mort du grand-père, un bon Samaritain était venu taper à leur porte pour les aider à payer les droits de succession, en leur prêtant 75 000 euros : un certain Mattesi-Bosso, encore lui. Un vrai talent d’anticipation.

A la mairie, Nathalie Peinado tient à jurer au Canard que tous, à commencer par elle, ont acheté « au prix du marché ». Giraud, lui, crie au coup tordu, alors qu’il brigue la présidence du département en 2014, et va même plus loin : « Mon fils a payé son terrain plus cher que certains voisins ! »

Des enfants d’élus qui allongent davantage que le pékin moyen : tout fout le camp, dans le Var...

Tag(s) : #Urbanisme
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